COMÉDIE FRANÇAISE

REVUE LITTÉRAIRE
Suzanne Sterzi

Mais que faisait-il là ? Couché sur des navets, lui ! C’eût été des lauriers, encore.

Je ne me souvenais plus de l’avoir déposé sur la commande du maraicher. Le persil lui chatouillait un tendre sourire et ses yeux d’épagneul me suppliaient :
– Je vous saurais gré de me déposer dans un endroit plus approprié à ma culture, qui n’est pas celle des champs.
– Tout de suite, lui ai-je répondu, je ne vais pas laisser un artiste comme vous fréquenter des personnages aussi terre à terre.
Que voulez-vous, ce sont des choses qui arrivent, on fait les courses puis on passe à la librairie et ça devient un mesclun.
Je saisis le livre et le dépose sur le divan, me promettant bien du plaisir… après, bien entendu, la dégustation d’un tian aux arômes du jardin.

Ce que je vous raconte est une vieille histoire : c’était vers la mi-février, Comédie Française de Fabrice Lucchini venait d’arriver en librairie. J’avais couru l’acheter car je suis fan de cet homme. Qu’il décline Molière, Céline, De La Fontaine, ou qu’il parle de son expérience d’apprenti coiffeur, j’aime sa folie. Ils nous parle des génies qu’il a côtoyés à travers la littérature, et je me dit : qui se ressemblent, s’assemblent. J’aime me laisser mener en Bateau ivre avec lui. Ce type est un géant… Rimbaud, bien sûr, mais Lucchini aussi.

Pourquoi est-ce que je ressasse une vieille histoire de livre sorti il y a presque un an, me direz-vous ? À cause de mon foyer que les nuits d’automne m’ont fait allumé. Si vous êtes de ceux qui ne cherchent pas les primeurs, et je ne parle pas de potager, mais des livres de la rentrée, il est toujours temps, au coin du feu, de lire Luchini.

Il nous invite dans ses tournages et ses aventures littéraires où il cueille des citations chez les grands, les immortels, les extraordinaires talents qu’il côtoie : citations qui m’ont remplie de bonheur et que j’aurais voulu apprendre par cœur pour ne plus les oubliées. Heureusement on peut toujours reprendre le livre et plonger dans sa vie d’artiste à travers la tante à Bébert, Perceval le Gallois ou Alceste : Alceste qu’il a interprété dans le film Alceste à bicyclette, jouant le personnage d’un vieil acteur misanthrope aux côtés de Lambert Wilson.

En fait, on ne le lit pas, Luchini, on l’écoute et ça vous tient chaud.